LE TRAIN OU VONT LES CHOSES, de Fred

La lokoapattes est tombée en rade, embourbée dans le marais. Les histoires qu’on lui raconte ne la font plus avancer. Sans carburant, elle reste là, immobile et impuissante. Charbon ? Electricité ? Essence ? Que nenni. La lokoapattes carbure à la vapeur d’imagination !

22+26

Il aura fallu 22 ans à Fred pour dessiner 15 histoires de Philémon, et 26 années de plus pour achever son oeuvre avec ce 16ème et dernier album intitulé « Le train où vont les choses ». Faut-il voir dans cette histoire de panne d’imagination une métaphore des problèmes que Fred a surmontés ces dernières années ? Nul ne le sait. En revanche, on sait qu’après être passé par des moments difficiles, Fred a su réagir de plus belle (je pense notamment à « L’histoire du corbac aux baskets » qu’il a écrit après un séjour en clinique)

Dans le cas présent, de nombreuses années se sont écoulées entre la réalisation des premières planches du « Train où vont les choses », et l’aboutissement de l’album. Mais à 82 ans aujourd’hui, Fred a du mal à dessiner debout et il a beaucoup moins de sensibilité au bout des doigts. La tache s’annonçait donc difficile. Faut-il retenir cela et les quelques conséquences graphiques sur l’album ?

Evidemment non. L’important est ailleurs.

Une carrière exceptionnelle

Ce qu’il faut retenir tout au long de ces presque 50 ans de carrière, c’est une liberté de parole tout droit sortie de chez Hara Kiri, le magazine bête et méchant dont il fut l’un des Directeurs Artistiques.
Ce qu’il faut retenir, ce sont ses débuts au journal Pilote et les premières publications de Philémon, soutenues par René Goscinny.
Ce qu’il faut retenir, c’est une manière de jouer avec les cases, les planches et les codes de la BD, dont beaucoup d’auteurs se sont inspirés.
Ce qu’il faut retenir, ce sont des albums qui sont devenus des références et qui ont bercé l’imaginaire de plusieurs générations d’auteurs et de lecteurs de Bande Dessinée.
Ce qu’il faut retenir, c’est une mythologie et un bestiaire très personnels, baignés de poésie et de mélancolie, et des histoires débordantes d’imagination.

Finir une histoire avant de s’endormir

Quand il était enfant, Fred s’imaginait des histoires le soir dans son lit, et il n’arrivait pas à s’endormir avant d’avoir trouvé la fin de son histoire. Aujourd’hui, malgré au train où vont les choses, Fred n’a pas changé, il est toujours cet enfant qui fait des rêves étranges et envoutants.

Avec ce dernier opus, il boucle la boucle nous invite à ne pas oublier les aventures de Philémon sur les lettres de l’Océan Atlantique. Ne pas oublier Anatole, son âne et fidèle compagnon. Ne pas oublier Félicien, l’oncle rêveur, et Hector, le papa très terre-à-terre. Ne pas oublier Monsieur Barthélémy le puisatier ermite, le centaure ou bien encore le Manu-manu.

Ne pas l’oublier lui, Fred Othon Aristidès.
Un des plus grands poètes de la bande-dessinée.

Informations pratiques

  • : Le train où vont les choses
  • Fred
  • Philémon (16ème et dernier tome)
  • : Dargaud
  • 2013

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